L’invitĂ© de Couples & Familles est Fabienne Lacroix, la fondatrice d’ExoNaiSens, un cabinet de coaching scolaire qui sâadresse notamment Ă un public de jeunes neuroatypiques.
Nous allons aborder le sujet de ces enfants qui ne rentrent pas tout Ă fait dans le moule, ainsi que leurs difficultĂ©s dâapprentissage et les moyens de favoriser l’insertion scolaire.
Ecoutez l’Ă©mission ici
Lisez l’interview ici
Chers aux auditeurs, bonjour et bienvenue dans cette Ă©mission animĂ©e par l’association Couples et Familles. En ce mois de dĂ©cembre 2021 paraĂźt notre nouveau dossier qui s’intitule âMon enfant est diffĂ©rentâ et qui couronne un trimestre de travail menĂ© avec nos membres. Dans ce dossier, nous nous penchons sur toutes sortes de circonstances personnelles qui peuvent rendre un enfant diffĂ©rent vis Ă vis d’une norme, des troubles de l’apprentissage ou de l’attention : le haut potentiel, la surditĂ©, la transidentitĂ© de genre, etc. J’ai le plaisir de recevoir aujourd’hui Fabienne Lacroix, qui a contribuĂ© Ă ce dossier. Fabienne a une formation d’assistante sociale et criminologue et elle a fondĂ© ExoNaisens, un cabinet de coaching scolaire s’adressant notamment Ă un public de jeunes neuroatypiques. Nous allons parler avec elle d’enfants qui ne rentrent pas tout Ă fait dans le moule, de leurs difficultĂ©s d’apprentissage et d’insertion scolaire.
Julien : Alors Fabienne, dans votre article, vous expliquez travailler auprĂšs de jeunes au fonctionnement atypique et afin de poser clairement le sujet pour nos auditeurs, je propose que vous dĂ©finissiez ce terme et peut ĂȘtre aussi que vous dĂ©criviez les diffĂ©rents profils particuliers quâil pourrait rĂ©unir.
Fabienne : Alors, je pense que la notion de personne atypique permet de mettre en Ă©vidence des personnes qui sont en dĂ©calage dans leur environnement, de par leur fonctionnement cognitif qui est qualitativement diffĂ©rent ou de par les troubles neuro dĂ©veloppementaux que l’on rencontre chez les personnes qui ont des troubles d’apprentissage ou des troubles du spectre autistique. Et donc, je suis amenĂ©e dans ce cadre Ă rencontrer, comme vous l’avez dit, des hauts potentiels, des jeunes qui ont des dys : la dysgraphie, la dyslexie, la dyspraxie, la dyscalculie, ⊠tous les dys possibles et aussi des personnes qui sont atteintes de troubles de l’attention avec ou sans hyperactivitĂ© ou qui prĂ©sentent des caractĂ©ristiques autistiques. Et donc, ce sont des personnes qui prĂ©sentent un dĂ©veloppement cognitif diffĂ©rent et qui nĂ©cessitent, Ă mon sens, un accompagnement que j’appelle d’ailleurs du copilotage, le temps que les fonctions cĂ©rĂ©brales puissent prendre toute leur maturitĂ© et que la personne puisse les utiliser pleinement. En tous les cas, quâelle puisse apprendre Ă compenser les difficultĂ©s dont elle est atteinte.
Julien : Et puisqu’on Ă©voque toutes ces diffĂ©rentes appellations, il me semble que surgit forcĂ©ment la question du diagnostic. Personnellement, j’ai le sentiment que cette Ă©tape est souvent prĂ©sentĂ©e un peu de maniĂšre ambivalente, Ă en croire certains tĂ©moignages que j’ai pu lire. Un diagnostic Ă la fois libĂšre et enferme en mĂȘme temps, il soulage et peut inquiĂ©ter. Il marque souvent la fin d’une longue recherche, mais aussi le dĂ©but d’un parcours qui va ĂȘtre long et difficile.
Jâaimerais bien que nous Ă©voquions un peu cette question selon votre point de vue de coach scolaire. Quelle est pour vous l’intĂ©rĂȘt de mettre de tels mots sur les troubles cognitifs ? Et est-ce quâil vous arrive Ă©galement d’accompagner des jeunes en difficultĂ© mais qui ne seraient pas diagnostiquĂ©s.
Fabienne : Cette question du diagnostic est Ă mon sens primordiale parce qu’elle va nous permettre d’identifier le plus correctement possible les troubles cognitifs dont le jeune souffre de maniĂšre Ă pouvoir l’aider. D’abord lâinformer, le conscientiser pour pouvoir passer Ă l’action. Donc, le bilan, pour moi, il n’enferme pas, il est intĂ©ressant, Ă condition qu’il vienne proposer des solutions qui vont permettre un autre devenir, un devenir plus positif, plus prometteur que ce qu’il a vĂ©cu dans le cadre scolaire. Il ne vit plus Ă travers ses difficultĂ©s, il vit avec ses difficultĂ©s et il construit un projet de vie. Donc, pour moi, le bilan ne va pas enfermer Ă condition que l’on donne des outils aux jeunes, on lâoutille pour pouvoir construire des solutions qui soient rĂ©alistes aussi et on lui permet de se mettre en action. Mais aussi on lui permet aussi de se reconnaĂźtre et d’ĂȘtre reconnu par ses proches, que ce soit sa famille ou les enseignants, tous les adultes qui l’accompagnent. Et ça, c’est une Ă©tape importante dans ce processus d’identification.
Julien : Oui, tout Ă fait, et je pense qu’on reviendra dans la seconde partie de l’Ă©mission Ă ce processus d’estime de soi et de reconnaissance. Mais avant ça, puisqu’on parle du coup de tous ces profils diffĂ©rents, j’ai l’impression qu’une chose les rĂ©unit. Ils ont un point commun qui vous concerne au plus haut chef, ce sont les difficultĂ©s d’apprentissage. Alors, dans l’article, vous parlez de dĂ©crochage scolaire et vous laissez entendre que la pĂ©riode de crise sanitaire que nous avons connue et que nous connaissons encore aurait empirĂ© la situation pour de nombreux jeunes.
Vous qui travaillez directement avec eux, comment diriez-vous que se présente la santé mentale des étudiants en cette période difficile ?
Fabienne : Alors, on ne peut pas gĂ©nĂ©raliser, mais en tous les cas, je rencontre, de par ma pratique professionnelle beaucoup de jeunes qui ne sont pas du tout en bonne forme, pas en bonne santĂ© mentale et qui ont en fait perdu le sentiment d’efficacitĂ© et de rĂ©ussite et qu’il faut arriver Ă remobiliser de maniĂšre Ă ce qu’ils puissent reconquĂ©rir cette santĂ© mentale. Je pense que ce sont des vases communicants, reprendre le volant de sa scolaritĂ© permet de reprendre le volant de sa vie, quelque part le volant de sa santĂ© mentale. Je pense vraiment que les deux sont liĂ©s, mais qu’il faut pouvoir les outiller et les accompagner, de nouveau je reprendrais le terme de copilotage parce que je pense que câest celui qui est le plus adĂ©quat que ce soit par les parents, par les enseignants ou par des accompagnants professionnels lorsque la situation le nĂ©cessite. Mais la santĂ© mentale a Ă©tĂ© trĂšs touchĂ©e chez les jeunes, et particuliĂšrement chez les jeunes qui Ă©taient dĂ©jĂ en difficultĂ© soit sociale, soit cognitive, de par leur profil cognitif et demander Ă ces jeunes de se prendre en charge durant le confinement a Ă©tĂ© beaucoup trop compliquĂ©. Ils ont dĂ©jĂ du mal Ă s’organiser, Ă anticiper et la situation inĂ©dite que nous avons connue n’a malheureusement que renforcĂ© leurs difficultĂ©s.
Julien : Oui, alors je vous entends bien dire le monde scolaire n’existe pas en vase clos, Ă©videmment, du monde familial ou personnel. Ăa, c’est quelque chose qu’on va discuter en seconde partie de cette Ă©mission, du rĂŽle et des liens qu’il y a entre le scolaire et le parascolaire. Je me trouve toujours avec Fabienne Lacroix qui gĂšre un service spĂ©cialisĂ© dans lâaccompagnement scolaire de jeunes atypiques.
Alors, Fabienne, dans la premiĂšre partie de notre Ă©mission, nous avons pour ainsi dire posĂ© le contexte en explorant un peu le profil de ces jeunes et les difficultĂ©s qu’ils peuvent rencontrer. Je propose que maintenant, nous parlions plus concrĂštement de votre mĂ©tier de coach d’Ă©tudiants Ă besoins spĂ©cifiques et en premier lieu, moi, je me pose la question du rythme de cet accompagnement. Est-ce que vos interventions sont dĂ©pendantes des rythmes scolaires et sâintensifieraient alors, par exemple, aux pĂ©riodes de test ou d’examens ?
Ou est-ce que vous proposez un parcours parallĂšle qui serait dĂ©connectĂ© du stress de l’Ă©cole ? Est-ce que vous privilĂ©giez des interventions ponctuelles ou un accompagnement suivi ? Est-ce que des objectifs Ă court ou long terme sont dĂ©terminĂ©s avec le jeune dĂšs l’entame du processus ? VoilĂ toutes les questions que je me pose et je me demandais si vous pouviez expliquer un peu la maniĂšre dont vont ainsi s’Ă©chelonner vos sĂ©ances au fil du temps.
Fabienne : Alors, les sĂ©ances ne peuvent pas se passer sur du court terme puisquâil sâagit de jeunes qui ont un fonctionnement atypique et particuliĂšrement un fonctionnement neurocognitif qui est encore en train de se dĂ©velopper comme chez tous les adolescents et lâintervention doit se prĂ©voir sur la durĂ©e parce que pour pouvoir leur apprendre Ă compenser, Ă implĂ©menter des outils de compensation, on ne peut malheureusement pas le faire sur du court-terme. Il faut pouvoir les aider, certains nĂ©cessitent plus de sĂ©ances que dâautres et dans un premier temps, les sĂ©ances sont assez rapprochĂ©es pour essayer de crĂ©er des automatismes et dâexpliquer aussi aux parents afin de travailler en synergie avec eux. Par la suite, on peut Ă©ventuellement espacer les rendez-vous, voir les suspendre et reprendre Ă un moment qui est plus particulier dans le cadre de la traversĂ©e du parcours scolaire. Il est clair quâun accompagnement Ă court terme est trĂšs compliquĂ© et, bien entendu, que lâon pose des objectifs. Un des objectifs câest que le jeune puisse devenir autonome dans ses apprentissages mais lâexpĂ©rience me montre quâil nâest pas possible de le faire en quelques sĂ©ances puisquâil sâagit de compenser ses difficultĂ©s et que cela nĂ©cessite la crĂ©ation dâautomatismes qui ne se font pas aussi rapidement que lâon ne le souhaiterait.
Julien : Et est-ce quâil arrive que ce soit les jeunes qui viennent dâeux-mĂȘmes avec des envies et des objectifs et qui posent avec vous un parcours qu’ils dĂ©sireraient accomplir et quâils leur permettent ensuite de sâauto-Ă©valuer eux-mĂȘmes en fonction de leurs besoins initiaux ?
Fabienne : Oui surtout chez des jeunes pour qui les sĂ©ances ont Ă©tĂ© suspendues parce que la situation sâĂ©tait nettement amĂ©liorĂ©e et que la famille pouvait prendre suffisamment le relais pour les aider Ă accomplir les tĂąches scolaires. Parfois, des Ă©tudiants que jâai connus reviennent avec une demande prĂ©cise : je ne comprends pas, je ne parviens pas Ă rĂ©aliser telle ou telle tĂąche, est-ce que tu pourrais mâaider, est-ce que tu pourrais mâoutiller ? Je les revois alors une ou deux fois, le temps de pouvoir travailler ce quâils me demandent. Parfois quand ils sont Ă lâuniversitĂ©, je les ai suivis en dĂ©but de secondaire et puis ils ont pris leur autonomie et ils reviennent avec des demandes trĂšs prĂ©cises et câest trĂšs intĂ©ressant de pouvoir rĂ©pondre Ă leurs demandes et Ă leurs sollicitations.
Julien : Oui, cela je veux bien croire dâautant quâune dimension de votre travail que vous Ă©voquez dans lâarticle et que lâon a un tout petit peu abordĂ© dans la premiĂšre partie de lâĂ©mission, câest lâimportance pour un jeune neurotypique de construire ou de reconstruire une estime de soi. Je prĂ©sume que câest une partie de votre mĂ©tier qui est trĂšs valorisante, trĂšs intĂ©ressante Ă vivre au quotidien avec des jeunes. Pourriez-vous nous dĂ©crire les bĂ©nĂ©fices de cette attitude et de lâestime de soi ainsi que la maniĂšre dont vous lâencouragez chez les jeunes ?
Alors, jâai une conviction câest que reprendre le volant de sa scolaritĂ© permet de reprendre le volant de sa vie et lâon reconquiert lâestime de soi et la confiance en soi mises Ă mal par les difficultĂ©s non identifiĂ©es. On a mis beaucoup de temps et câest souvent sur les Ă©checs rĂ©pĂ©titifs que lâon va venir identifier ces difficultĂ©s atteignant jusquâĂ la sphĂšre familiale. On va pouvoir reconstruire en portant un regard diffĂ©rent sur la situation et en donnant les outils leur permettant une rĂ©elle mĂ©tamorphose par la reprise de confiance en eux, par les actions et par les petites rĂ©ussites. Il faut pouvoir encourager la rĂ©ussite aussi minime soit-elle. Câest toujours positiver, positiver, et certains parents me regardent un peu bizarrement quand jâutilise ce mot de mĂ©tamorphose autant physique que psychologique mais quelques mois aprĂšs ils se rendent compte quâeffectivement cette mĂ©tamorphose a rĂ©ellement lieu. Ce qui me motive au quotidien câest que le scolaire nâest quâun levier pour arriver justement Ă ce mieux ĂȘtre pour que le jeune puisse aller vers son projet personnel quâil soit scolaire ou non, quâil fasse des hautes Ă©tudes ou non, lĂ nâest pas lâimportant. Lâimportant câest quâil puisse aller vers ce qui le fait vibrer et de trouver sa voie et sa juste place.
Julien : Oui et vous insistez Ă©galement sur le rĂŽle bĂ©nĂ©fique des pairs quâun jeune peut ĂȘtre amenĂ© Ă cĂŽtoyer. Jâai vu sur votre site internet que vous organisez notamment des ateliers dâĂ©tude supervisĂ©e et je me demandais si le but est de proposer aux plus jeunes des modĂšles qui leur permettront justement de valoriser leurs diffĂ©rences et construire leur estime de soi ? Est-ce pour cela que vous prĂŽner des ateliers collectifs qui vont leur permettre de se rencontrer ?
Fabienne : Les ateliers collectifs sont partis dâun constat que coacher en individuel, vous donner les outils, ils les comprennent bien mais souvent ils ne parviennent pas Ă les utiliser dans le quotidien et donc ils en ont une connaissance intellectuelle mais ils ne la pratiquent pas. Les outils restent bien Ă©videmment inefficaces, dâoĂč lâidĂ©e de lâatelier dâĂ©tude supervisĂ©e oĂč jâai pu remarquer quâil y a comme une alchimie du groupe mais certainement pas en leur proposant des modĂšles parce que ce sont des jeunes qui justement ne fonctionnent pas dans les modĂšles.
Mais ils se retrouvent entre pairs et ils peuvent exprimer rĂ©ellement ce quâils sont et ils peuvent exprimer leur vĂ©cu parce que les autres vivent la mĂȘme chose et donc il nây a pas de jugement qui est posĂ©. Ils peuvent aussi ĂȘtre rassurĂ© en se rendant compte que dâautres jeunes peuvent vivre des difficultĂ©s similaires. Ils sont rassurĂ©s, ils reçoivent des encouragements des autres en disant âallez, fais-le tu verras, tu seras beaucoup mieux ou fais lui confiance, tu vas voir elle nous a emmenĂ© beaucoup plus loin quâon ne lâimaginaitâ et donc je pense que câest cela qui est important mais certainement pas leur proposer des modĂšles.
Julien : Nous retrouvons Fabienne Lacroix qui est coach scolaire pour la troisiĂšme partie de lâĂ©mission. Avant la pause musicale, nous Ă©voquions le rĂŽle important que peuvent jouer des pairs, des camarades Ă©galement neuroatypiques pour un jeune en difficultĂ©. Cependant, vous vous positionnez non pas en faveur dâun enseignement spĂ©cialisĂ© qui rĂ©unirait uniquement des Ă©lĂšves qui se sont vu diagnostiquer des troubles cognitifs similaires mais en faveur dâun enseignement en inclusion. Est-ce que vous pourriez rappeler Ă nos auditeurs les diffĂ©rences entre ces deux modĂšles et justifier votre prĂ©fĂ©rence pour lâenseignement en inclusion ?
Fabienne : Oui, il y a des Ă©coles plutĂŽt de type Ă©cole privĂ©e qui se sont ouvertes afin de recevoir des jeunes qui ne sây retrouvaient pas dans le systĂšme dâenseignement classique. Mais je pense que la difficultĂ© dans ce type dâĂ©tablissement, câest que vous retrouvez tous des jeunes qui Ă©taient en Ă©chec dans le systĂšme et qui ne permettent pas de vivre en situation rĂ©elle. Personnellement je suis pour lâinclusion dans lâenseignement classique parce que ces jeunes, un jour ou lâautre, se retrouveront dans le monde professionnel et heureusement pour eux. Je pense quâil faut pouvoir les accompagner face Ă leurs diffĂ©rences, Ă se familiariser aux dĂ©calages quâils prĂ©sentent tout en Ă©tant accompagnĂ©s par les adultes pour dĂ©coder ce quâils vivent et pouvoir dĂ©velopper dâautres comportements parce que parfois les difficultĂ©s viennent du comportement quâils posent et câest en les accompagnant, au jour le jour, dans un environnement le plus naturel possible, me semble-t-il que lâon peut les prĂ©parer Ă leur vie future puisque dans leur vie professionnelle ils rencontreront tout un chacun. Et sâils ont Ă©tĂ© mis dans une espĂšce de cocon, dans un environnement presque privilĂ©giĂ©, ils ne vont pas apprendre Ă dĂ©velopper de nouvelles aptitudes pour aller vers lâinclusion et je pense alors quâils seront en difficultĂ© lorsquâils vont sâinsĂ©rer dans le monde professionnel, ce qui nâest Ă©videmment pas lâobjectif en soi.
Julien : Oui absolument. Mais un obstacle que lâon Ă©voque souvent au sujet de la gĂ©nĂ©ralisation de lâenseignement en inclusion, câest que les professeurs de lâenseignement ordinaire ne seraient pas suffisamment formĂ©s pour prendre en charge des Ă©lĂšves Ă besoins spĂ©cifiques. Alors je me demandais oĂč lâon en est aujourdâhui dans cette prise de conscience de la part du monde Ă©ducatif. Est-ce quâaujourd’hui, il y a des initiatives qui sont prises pour mieux accueillir des Ă©lĂšves Ă besoins spĂ©cifiques dans lâenseignement ordinaire ?
Fabienne : Oui cela certainement, il y a de plus en plus dâinformations qui sont communiquĂ©es au monde enseignant, il y a des brochures que la communautĂ© française distribue le plus largement possible, des brochures qui sont bien faites mais cela reste une brochure. Quand on n’a pas le vĂ©cu et la supervision de quelquâun qui connait plus finement les personnes atypiques, cela reste trop thĂ©orique. Je pense aussi que les dĂ©couvertes neuroscientifiques ne sont pas suffisamment transmises au sein du monde des enseignants. Quand on leur parle des atypiques et de ce que lâon peut amĂ©nager pour eux, cela semble encore trop thĂ©orique et pas suffisamment expĂ©rimentĂ© de leur part par peur de mal faire. Ils attendent donc parfois dâavoir un diagnostic mĂ©dical qui tarde Ă venir parce que cela prend du temps et parce quâil y a parfois trop de demandes par rapport au nombre de professionnels qui peuvent pratiquer ces bilans. Et les professeurs par peur de mal faire attendent et pendant ce temps, le jeune se retrouve en Ă©chec et en tout cas, perd son estime de soi et sa confiance en lui alors que lâon pourrait sâils Ă©taient mieux informĂ©s et mieux formĂ©s, je pense que lâon pourrait Ă©viter beaucoup de lenteur et de perte de confiance chez les jeunes.
Julien : Donc du coup, il y a tout de mĂȘme des initiatives qui sont proposĂ©es en termes de formation continue aux enseignants ?
Fabienne : Oui certainement, il y a de plus en plus de formations qui sont proposĂ©es et celui qui souhaite se former peut trouver des endroits pour ce faire mais câest souvent encore liĂ© Ă des initiatives individuelles alors que je pense que cela devrait faire partie intĂ©grante de la formation initiale des enseignants, ce que je pense nâest pas encore le cas.
Julien : TrĂšs bien et bien du coup si les enseignants nous Ă©coutent, ils peuvent solliciter le pouvoir organisateur pour pouvoir bĂ©nĂ©ficier de formation individuelle mais Ă©videmment si un ministre par chance nous Ă©coute, jâespĂšre que cette revendication, ce besoin de formation initiale dâavantage orientĂ© vers les jeunes Ă besoins spĂ©cifiques sera entendu. Merci infiniment Fabienne dâavoir bien voulu lever un peu le voile sur votre mĂ©tier et sur la rĂ©alitĂ© scolaire de jeunes Ă besoins spĂ©cifiques.
Alors je rappelle que vous ĂȘtes une contributrice du dossier Couples et Familles, numĂ©ro 138 qui paraĂźt en ce mois de dĂ©cembre 2021 et qui sâintitule âMon enfant est diffĂ©rent.â Pour le commander, rendez-vous sur www.couplesetfamilles.be et si vous souhaitez en savoir plus sur les services que propose notre invitĂ©, je vous propose de consulter le site internet de son cabinet de coaching, www.exonaisens.be.
Envie de dĂ©couvrir l’article du dossier Dossier Couples et Familles, n°138, 4Ăšme trimestre 2021